À 92 ans, Paul Biya, président du Cameroun depuis 1982, s’apprête à briguer un huitième mandat lors de l’élection présidentielle prévue le 12 octobre prochain. Une requête en inéligibilité déposée contre lui vient d’être rejetée par le Conseil constitutionnel, confirmant ainsi sa candidature et ravivant les débats sur la longévité politique et les enjeux démocratiques dans le pays.
Une décision sans appel
La requête, introduite par un collectif d’avocats et de personnalités de la société civile, invoquait des motifs d’âge avancé, de santé et de respect des principes démocratiques pour contester la validité de la candidature de Paul Biya. Le Conseil constitutionnel, dans une décision rendue publique le 24 août, a jugé ces arguments irrecevables, estimant que la Constitution camerounaise ne fixe aucune limite d’âge pour se présenter à la magistrature suprême.
> « Le Conseil constitutionnel a statué en conformité avec les textes en vigueur. Il n’appartient pas à cette juridiction de se prononcer sur l’opportunité politique d’une candidature », a déclaré Patrice Férus, journaliste à TV5MONDE.
Une longévité politique hors norme
Paul Biya est l’un des chefs d’État les plus anciens en exercice dans le monde. Arrivé au pouvoir en novembre 1982, il a traversé les décennies sans jamais céder sa place, consolidant son autorité à travers des révisions constitutionnelles et une gestion centralisée du pouvoir. Sa réélection en 2018, avec plus de 71 % des voix selon les résultats officiels, avait déjà suscité des contestations et des accusations de fraude.
Sa candidature en 2025 intervient dans un contexte de tensions sociales, de défis sécuritaires dans les régions anglophones, et d’une jeunesse de plus en plus critique face à un système qu’elle juge figé.
Une élection sous haute surveillance
La présidentielle du 12 octobre s’annonce comme un test majeur pour la démocratie camerounaise. Plusieurs figures de l’opposition, dont Maurice Kamto et Cabral Libii, ont déjà annoncé leur intention de se présenter. Mais face à un appareil d’État solidement contrôlé par le parti au pouvoir, le RDPC (Rassemblement démocratique du peuple camerounais), les chances d’alternance semblent minces.
Des observateurs internationaux, dont ceux de l’Union africaine et de la Francophonie, sont attendus pour superviser le scrutin. La société civile, quant à elle, appelle à une mobilisation citoyenne pour garantir la transparence du processus électoral.
Réactions contrastées
La décision du Conseil constitutionnel a suscité des réactions contrastées. Les partisans de Paul Biya saluent la continuité et l’expérience d’un homme qu’ils considèrent comme un garant de la stabilité. Ses détracteurs, eux, dénoncent une confiscation du pouvoir et appellent à une réforme profonde du système politique.
> « Ce n’est pas seulement une question de droit, c’est une question de morale politique. Le Cameroun mérite une nouvelle génération de dirigeants », a déclaré un militant du MRC (Mouvement pour la renaissance du Cameroun).
Le Cameroun entre dans une période électorale cruciale, où les enjeux dépassent la simple reconduction d’un président. Ils touchent à l’avenir d’une nation en quête de renouveau, de justice et de représentativité. Le 12 octobre, les urnes parleront — mais la rue, les réseaux sociaux et les consciences sont déjà en ébullition.