Pendant que en France la reforme des retraites fait débat et manifestation, au Cameroun les reformes des retraites sont fait par décret présidentiel. En 2020 le présidant monsieur Biya présentait un décret sur les retraites .
Le premier décret est signé du président de la République, Paul Biya. Il fixe l’âge de départ à la retraite des fonctionnaires camerounais. Désormais, tous les fonctionnaires de catégories “A” et “B” iront à la retraite à 60 ans, tandis que ceux des catégories “C” et “D” iront à 55 ans. Le second décret est quant à lui signé du premier ministre de l’époque Mr. Joseph Dion Ngute. Il concerne l’harmonisation de l’âge de départ à la retraite des agents de l’Etat relevant du Code du travail. Ces derniers iront se reposer à 60 ans pour les personnels de catégories “8” à “12”, et à 55 ans pour les catégories “1” à “7”.
Ces deux décisions viennent mettre fin à la discrimination observée depuis lors au pays. En effet, alors que certains fonctionnaires bénéficiaient d’un départ à la retraite à 60 ans, d’autres devaient cesser de travailler à 55 voire 50 ans. Une situation longtemps décriée par les différents syndicats des corps défavorisés. Pour mémoire, d’après le statut général de la fonction publique camerounaise, les fonctionnaires sont répartis en quatre (4) catégories désignées dans l’ordre hiérarchique décroissant par les lettres A, B, C et D. Ainsi, les postes de travail de la catégorie A correspondent aux fonctions de conception, de direction, d’évaluation ou de contrôle. Ceux de la catégorie B correspondent aux fonctions de préparation, d’élaboration et d’application. La catégorie C correspond à des tâches d’exécution spécialisée, et la catégorie D à des tâches d’exécution courante.
Qu’il exerce dans le secteur public, parapublic ou privé, tout employé est appelé à un moment donné, à mettre un terme à son activité principale pour jouir d’un repos bien mérité. Il fait alors valoir ses droits à la retraite, selon la formule consacrée. Le départ à la retraite qui devrait être salué par tous, est malheureusement encore redouté par de nombreux travailleurs pour plusieurs raisons.
D’abord, d’aucuns le perçoivent comme un saut dans l’inconnu, dans la mesure où les possibilités de reconversion sont rares. Ensuite, parce qu’il correspond pour certains à la perte d’importants avantages : véhicule( s) et/ou logement de fonction, indemnités, assurance- maladie, etc. Par ailleurs, l’on redoute le fait que la période entre la cessation de paiement du salaire et le paiement de la pension de retraite peut être élastique. Mais, de toutes les questions liées au départ à la retraite, l’une de celles qui font le plus débat aujourd’hui au Cameroun est relative à l’âge de départ à la retraite pour les personnels de l’Etat.
Conformément au statut spécial de la Fonction publique, les fonctionnaires des catégories C et D vont à la retraite à 50 ans, ceux des catégories A et B à 55 ans, sauf dérogation spéciale. Quant aux personnels non fonctionnaires, ils vont à la retraite à 50 ans pour les décisionnaires (jusqu’à la 6e catégorie), 55 ans pour les contractuels de la 7e à la 9e catégorie, et à 55 ans pour les cadres contractuels. Lorsque le statut était appliqué à tous, le problème ne se posait pas.
Seulement, on assiste depuis quelque temps à une multiplication de statuts spéciaux. Avec pour dénominateur commun, un départ à la retraite plus long que celui prévu par le statut général de la Fonction publique. A titre d’illustration, les enseignants du secondaire vont à la retraite à 60 ans au lieu de 55 ans, ceux du supérieur à 60 ans pour les chargés de cours, 65 ans pour les maîtres de conférences et les professeurs. L’un des arguments qui avait prévalu au moment de la confection d’un statut spécial pour les enseignants du secondaire était qu’il fallait susciter des vocations afin de combler le déficit en éducateurs dans les lycées et collèges.
Or, constatent les partisans de l’harmonisation de l’âge du départ à la retraite, le déficit perdure malgré la multiplication des recrutements car de nombreux enseignants désertent les salles de classe, font carrière dans d’autres administrations, tout en conservant les avantages liés à leur intégration à la Fonction publique. Pour les enseignants d’universités, il était question de tenir compte du temps mis pour la préparation des thèses et autres agrégations.
Un argument que battent en brèche ceux qui pensent que dans ces conditions, les médecins qui préparent une thèse de doctorat en sept ans après le baccalauréat, devraient aussi bénéficier d’un statut spécial. Les arguments en faveur ou contre l’harmonisation de l’âge du départ à la retraite sont nombreux et pertinents. Une Commission interministérielle élargie aux syndicats et autres partenaires sociaux planche sur la question depuis quelque temps. Avec en toile de fond, une question pertinente : comment financer le coût d’une éventuelle harmonisation ? CT ouvre le débat dans ses colonnes.
en 2016 Roland Claude Ngo’o disait ,
» C’est une question d’égalité, ce sujet pose plusieurs problèmes notamment la perception de l’admission à la retraite, la différence des profils en termes de réalisations personnelles selon les secteurs d’activités, le non-respect des profils et des carrières, la différence des chemins de progression, la prorogation, la responsabilité et l’efficacité des personnels de l’Etat ayant acquis une certaine expérience ainsi que la gestion cloisonnée qui favorise l’explosion des égoïsmes corporatistes.
A l’origine, il y a le décret no 74 /138 du 18 février 1974 portant statut général de la Fonction publique. Les statuts particuliers qui ont vu le jour pour un certain nombre n’ont pas respecté les dispositions du statut général. L’exercice de réécriture des statuts des différents corps a donc donné lieu à une gestion, au cas par cas, qui consacre l’inégalité de traitement et un sentiment de frustration de la part de ceux des fonctionnaires dont l’âge de départ est resté inchangé. Mais, l’on doit surtout se demander pourquoi l’allongement de la durée de service est réclamé et célébré comme une victoire par les corps bénéficiaires, puis comme un abandon/ désaveu par les corps de fonctionnaires non concernés.
Pourquoi le départ à la retraite est-il considéré négativement par le fonctionnaire au Cameroun, alors qu’il est affiché comme un droit au repos mérité, selon l’expression consacrée « faire valoir ses droits à la retraite » ? L’on ne peut pas, dans un espace de temps réduit, faire toute l’économie de la question. Dans cet environnement où l’allongement de la durée règlementaire de service est accordé pour certains corps et pas pour d’autres, la dévolution normale qu’est l’admission à la retraite se vit comme une frustration. D’où les multiples et incessantes demandes d’harmonisation. Faut-il en rajouter ?
Les raisons souvent évoquées pour justifier que ce traitement de faveur, puisqu’il faut désormais l’appeler ainsi, soit accordé à certains corps et pas à d’autres, passent difficilement dans la compréhension collective. Qu’y gagneraient les fonctionnaires ? Où est l’intérêt de l’Etat ? Pour les fonctionnaires et les autres personnels de l’Etat, le premier bénéfice – il est individuel – serait des revenus salariaux et extrasalariaux considérables perçus pendant davantage d’années ; il n’ya pas photo avec la pension de retraite. Le second intérêt serait un retour à une considération égalitaire des fonctionnaires de tous les corps de métiers. D’où la nécessité d’harmoniser l’âge de départ à la retraite ».
toujours en 2016 Moustafa Eli, lui il disait.
« A l’instar des autres pays africains, le Cameroun dispose d’une population essentiellement jeune, donc demandeuse d’emplois. Selon les projections du 3e Recensement général de la population et de l’habitat de 2005, la population camerounaise reste caractérisée par son extrême jeunesse. La population ayant moins de 15 ans représente 43,6% de la population totale tandis que celle de moins de 25 ans représente 64,2%. La pyramide des âges de la population du Cameroun présente une allure générale semblable à celles des populations africaines au sud du Sahara.
Le Cameroun se classe ainsi dans la phase de ce que les démographes appellent la pré transition démographique caractérisée par une forte natalité et une forte mortalité. Cette situation démographique du Cameroun constitue à la fois un atout pour le pays et comporte aussi des problèmes de développement : un atout en terme d’élargissement du marché national de consommation des biens et services et des problèmes de développement en terme de demande sociale à satisfaire (santé, éducation, emploi, protection sociale, etc.).
D’autre part le BIT pense aussi que le nombre moyen de jeunes Camerounais qui arrivent sur le marché de l’emploi chaque année est de 70 %. Il est donc clair que l’un des défis auxquels les jeunes sont confrontés reste la recherche d’un emploi décent pouvant assurer leur équilibre socio-économique. Quand on sait que notre tissu économique est le secteur peu développé, la Fonction publique reste la plus grande pourvoyeuse d’emplois aux jeunes. Sans doute, pour la raison évidente de la sécurité dans l’emploi, la majorité des jeunes en chômage, surtout du niveau secondaire ou supérieur, préfère les emplois salariés dans la Fonction publique ou le secteur privé moderne. Pour que les jeunes aient la chance de s’insérer dans le tissu économique, il faut asseoir une bonne politique de relève au niveau de l’administration publique.
Comment va-t-on faire face à ces milliers de jeunes à la quête de l’emploi si on n’envoie pas les fonctionnaires à la retraite? La mise en application de la circulaire du Premier ministre chef du Gouvernement du 12 novembre 2015 relative à la cessation de service des agents publics admis à faire valoir leur droit à la retraite reste salutaire; car elle aura permis de garantir l’équité entre les générations et la justice sociale. Mais ce rappel de hautes directives du chef de l’Etat sur cette question ne doit pas connaître une application à géométrie variable ».