Limitation du regroupement familial, plafonds migratoires, fin de l’AME, un débat annuel au Parlement… Le groupe Les Républicains à l’Assemblée a déposé une nouvelle loi sur l’immigration mercredi 31 Mai 2023, pour mettre un peu plus la pression sur le gouvernement.
Avant que le gouvernement ne dévoile son projet de loi sur l’immigration, qu’il souhaite faire adopter d’ici à la fin de l’année, Les Républicains prennent les devants en déposant leurs propres propositions de loi sur le sujet. Le parti d’Eric Ciotti prévoit deux textes. Ils ont donc pour vocation de servir de base à une négociation avec le gouvernement : d’une part, une proposition de loi constitutionnelle, dont les cadres LR ont d’ores et déjà affirmé qu’elle devrait permettre à la France de s’émanciper des règles européennes en termes d’immigration.
La droite veut ainsi mettre en place un débat annuel au Parlement qui servira à fixer des plafonds migratoires année après année. Le texte évoque aussi un durcissement des conditions d’obtention des titres de séjour avec la création d’un fonds d’installation afin d’imposer des conditions de ressources et de logement décents. Les députés veulent fixer une somme équivalente à quatre fois le Smic pour un couple, et six fois le Smic pour une famille avec trois enfants.
Une quarantaine de mesures au total ?
D’autre part, une proposition de loi ordinaire. Cette dernière, qui devrait être déposée mercredi, est presque prête, et d’après les informations recueillies par France Inter, parmi la quarantaine de mesures qu’elle devrait proposer, on y trouvera notamment la mise en place d’un débat annuel au Parlement qui servira à fixer des plafonds migratoires année après année.
Elle prévoirait aussi un durcissement des conditions d’obtention des titres de séjour en imposant des conditions de ressources et de logement décents : cela passerait par la création d’un « fonds d’installation », une somme qui serait requise comme condition pour s’installer légalement – et qui devrait être fixée à l’équivalent de quatre fois le Smic pour un couple, et six fois le Smic pour une famille avec trois enfants. Et dans le cas d’un mariage, le délai pour pouvoir demander la nationalité française serait repoussé de cinq à huit ans.
La mise en place d’une « caution retour » pour les étudiants
La proposition de loi prévoit également de remplacer l’aide médicale d’Etat (AME) par une aide médicale d’urgence (AMU), moins avantageuse, et de limiter l’accès au regroupement familial aux mineurs de moins de 16 ans, contre 18 aujourd’hui. Les députés LR proposent aussi la mise en place d’une « caution retour » pour les étudiants, une somme qui sera retenue en cas de non-respect d’une obligation de quitter le territoire français (OQTF) mais qui sera restituée si l’étudiant part volontairement ou obtient un nouveau titre de séjour. Parmi les mesures figure encore une facilitation des expulsions, avec le retour de la double peine, c’est-à-dire le fait d’expulser les étrangers après leur condamnation effectuée. Ce dispositif a été limité à de très rares cas de figure en 2003, par le ministre de l’Intérieur de l’époque Nicolas Sarkozy.
Une prochaine loi constitutionnelle pour s’émanciper des règles européennes
La fin de l’hébergement des déboutés de demande d’asile, et un placement en centre de rétention administrative des demandeurs d’asile ressortissants de « pays sûrs » dont la demande sera examinée sous quinze jours, sont aussi mentionnées dans cette proposition de loi LR.
Le parti d’Eric Ciotti prévoit en parallèle de déposer une proposition de loi constitutionnelle, dont les cadres LR ont d’ores et déjà affirmé qu’elle devrait permettre à la France de s’émanciper des règles européennes en termes d’immigration. De son côté, le gouvernement refuse tout affranchissement des traités européens.
Sur le fond de la réforme qu’il propose, est-il question de revenir sur des traités comme la Cour européenne des droits de l’Homme ?
« Je veux que les Français approuvent par référendum une réforme constitutionnelle qui nous permette de retrouver notre souveraineté et qui dise qu’en matière migratoire on ne peut pas subir la pression migratoire du fait de ces engagements Il faut dire que le droit national en matière migratoire doit primer en chaque circonstance.
Si demain nous sommes en responsabilité, les Français devront choisir. Et j’appelle le Président de la République à faire ce référendum : savoir qui on veut accueillir et qui on ne veut pas accueillir, c’est aux Français de le décider et pas à des textes qui ont une légitimité qui n’est pas installée », selon Éric Ciotti.
Points de convergence et blocages
Le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin, qui se disait ce week-end en attente de prendre connaissance du texte, est ouvert sur certains points : la modulation de l’aide au développement à la mise en œuvre des laissez-passer consulaires par les pays concernés par exemple, ou encore l’ouverture des prestations sociales à partir de cinq ans de résidence.
Mais il y a des points de blocage qui sont toujours là : LR ne dit pas un mot sur d’éventuelles régularisations. C’est pourtant la mesure phare du gouvernement, qui de son côté continue de refuser catégoriquement l’idée de pouvoir s’affranchir des traités européens sur les questions d’immigration, voulue par la droite. Chacun avance donc ses pions, mais on est encore loin d’un accord qui permettrait le vote d’une réforme.