Locaux insalubres, manque d’intimité, violences… Dans des recommandations publiées au Journal officiel le 22 juin 2023, la Contrôleuse générale des lieux de privation de liberté (CGLPL) constate les conditions de vie indignes des personnes retenues dans les centres de rétention administrative en France.
On compte 25 centres de rétention administrative (CRA) en France (1 936 places), dont quatre en outre-mer, où sont retenus les étrangers en situation irrégulière avant leur expulsion du territoire. La rétention est décidée par l’administration et peut durer jusqu’à 90 jours. En 2022, 15 922 personnes sont passées par ces centres en métropole et 27 643 en outre-mer. La loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur, adoptée en décembre 2022, prévoit d’atteindre 3 000 places de CRA en 2027.
La Contrôleuse générale des lieux de privation de liberté (CGLPL) a transmis au gouvernement une série de recommandations relatives à quatre centres de rétention administrative : Sète (Hérault), Metz (Moselle), Lyon 2 (Rhône) et Mesnil-Amelot (Seine-et-Marne). Ces recommandations ont été publiées au Journal officiel du 22 juin 2023.
Des conditions de vie indignes
Lors de ses visites dans les centres de rétention, la CGLPL a relevé des conditions d’hébergement « gravement attentatoires à la dignité et aux droits fondamentaux des personnes retenues« . Les locaux des CRA sont décrits comme « dégradés » et « mal entretenus » : sanitaires sales et humides, murs souillés et maculés de graffiti… En hiver, les retenus souffrent du froid en raison de problèmes de chauffage ou d’eau chaude.
Dans le CRA de Lyon, ouvert en janvier 2022 et qui devait « servir de modèle” pour la construction de nouveaux centres, les lieux et espaces de vie sont dépourvus d’ouverture vers l’extérieur. Les personnes retenues y sont privées d’intimité, notamment dans les sanitaires. Les portes des chambres ne pouvant être fermées à clé, elles sont bloquées avec des matelas ou des cordes de fortune pour se protéger des intrusions.
Des mineurs accompagnant leurs familles sont parfois retenus dans ces lieux de privation de liberté. En 2022, 94 enfants ont été placés en rétention, soit 18 de plus qu’en 2021. Au CRA de Metz, près de 40% des enfants placés étaient âgés de cinq ans ou moins.
La CGLPL dénonce également les faibles portions de nourriture, le manque d’activités ou encore la difficulté d’accès aux soins pour les retenus.
Une lente carcéralisation des CRA
Les centres de rétention sont de plus en plus sécurisés et s’apparentent à des prisons avec des espaces cloisonnés et des clôtures surmontées de barbelés. La surveillance se fait exclusivement à travers des caméras, sans contact avec les personnes retenues, livrées à elles-mêmes. Les retenus sont parfois isolés pour motif sécuritaire ou sanitaire, alors que ces mesures n’ont aucun cadre réglementaire ni fondement légal.
L’administration explique ce renforcement de la sécurité par l’évolution du profil des étrangers retenus qui seraient de plus en plus des sortants de prison.
Ce phénomène de « carcéralisation » des CRA et ces conditions de vie indignes nourrissent le climat de violence qui règne dans les nombreux centres. La situation est accentuée par le fait que les personnes retenues passent de plus en plus de temps dans les CRA. De sept jours en 1981, la durée maximum de rétention est passée à 45 jours en 2011 et 90 jours en 2019.