Le traité confère un statut particulier aux Algériens en France en matière de circulation, de séjour et d’emploi. Les députés LR voulaient y mettre fin, estimant que le texte « facilite l’immigration ». Les députés ont rejeté, le jeudi 7 décembre 2023, la proposition de résolution appelant à dénoncer l’accord franco-algérien de 1968 qui facilite la venue d’Algériens en France, par 151 voix contre 114. Le texte, qui figurait à la première position de la journée de « niche », a été examiné dans une ambiance houleuse.
Les députés ont rejeté le jeudi 7 décembre 2023 la proposition de résolution appelant le gouvernement à dénoncer l’accord franco-algérien du 27 décembre 1968, par 151 voix contre 114. Cette proposition a été défendue en première position de la journée d’initiative parlementaire des élus Les Républicains, qui permet au groupe de définir l’ordre du jour.
Le traité de 1968, conclu à l’issue de la guerre d’Algérie, confère un statut particulier aux Algériens en France en matière de circulation, de séjour et d’emploi. Il a déjà été amendé à trois reprises, en 1985, 1994 et 2001.
En vertu de ce texte, « les Algériens bénéficient de la liberté d’établissement pour exercer une activité de commerçant ou une profession indépendante. Les ressortissants algériens peuvent accéder plus rapidement que les ressortissants d’autres Etats à la délivrance d’un titre de séjour valable dix ans », résume le ministère de l’Intérieur
L’accord franco-algérien
La circulation, le séjour et le travail des Algériens en France sont régis de manière complète par l’accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié. Ils relèvent ainsi d’un régime spécifique. Le droit commun ne leur est pas appliqué, à l’exception des dispositions de procédure. L’accord prévoit également les règles concernant la nature et la durée de validité des titres de séjours qui leur sont délivrés. Ces titres de séjour portent le nom de « certificats de résidence » et leur durée de validité est soit d’un an soit de dix ans.
Les principales spécificités de ce régime sont les suivantes :
- L’entrée des Algériens en France est facilitée (condition d’entrée régulière, et non de visa de long séjour, pour la délivrance de certains titres de séjour). ;
- Les Algériens bénéficient de la liberté d’établissement pour exercer une activité de commerçant ou une profession indépendante ;
- Les ressortissants algériens peuvent accéder plus rapidement que les ressortissants d’autres États à la délivrance d’un titre de séjour valable 10 ans.
Ainsi, le conjoint algérien d’un Français se voit délivrer un certificat de résidence de 10 ans après un an de mariage et le parent d’un enfant français l’obtient à l’échéance d’un premier certificat de résidence d’un an.
Les membres de famille admis au séjour en France au titre du regroupement familial reçoivent un titre de séjour de même durée que la personne qu’ils rejoignent. Ils reçoivent donc un certificat de résidence valable 10 ans dès leur arrivée sur le territoire français si l’accueillant est porteur d’un tel titre de séjour.
En outre, s’ils ne l’ont pas obtenu avant, les ressortissants algériens peuvent solliciter un certificat de résidence de 10 ans après 3 ans de séjour, contre 5 ans dans le cadre du droit commun, sous condition de ressources suffisantes.
En revanche, les titres de séjour créés par les lois de 2003, 2006, 2018 ne leur sont pas applicables, notamment les titres de séjour en matière d’immigration professionnelle tels que la carte de séjour pluriannuelle portant la mention « passeport talent » ou encore la carte de séjour pluriannuelle portant la mention « étudiant programme de mobilité », qui n’ont pas d’équivalent dans l’accord franco-Algérien.
En outre, s’il souhaite exercer une activité salariée en France, l’algérien titulaire d’un certificat de résidence mention « étudiant » doit solliciter une autorisation provisoire de travail et ne peut travailler au maximum 50 % de la durée annuelle de travail pratiquée dans la branche ou la profession concernée (contre 60 % de la durée annuelle légale du travail pour les autres nationalités)
Le gouvernement défavorable, la majorité divisée
« Nous voulons en finir avec cette exception juridique qui facilite l’immigration des ressortissants algériens vers notre pays », avaient écrit les auteurs de la résolution proposée par LR. Leur projet de résolution, même adopté, n’aurait pas eu de valeur contraignante.
La majorité était divisée au sujet de cette proposition. Le groupe Horizons, qui en fait partie, avait lui-même fait émerger ce sujet au printemps, et ses membres présents en séance ont voté en faveur de la résolution, selon le détail du scrutin, publié sur le site de l’Assemblée. Certains députés macronistes ne voyaient pas d’un mauvais œil l’envoi d’un « signal » à l’Algérie, et deux députés du groupe Renaissance ont voté en faveur du texte.
Mais le groupe Renaissance s’était accordé sur un vote défavorable. Une dénonciation serait contre-productive, avait estimé le ministre délégué au Commerce extérieur Olivier Becht, pour qui le risque était de provoquer « une réaction des autorités algériennes qui aurait de sérieuses conséquences et pourrait conduire à geler le dialogue migratoire ».
« Vous voulez faire plaisir à la frange de votre électorat la plus extrême », a lancé aux LR l’écologiste Sabrina Sebaihi, soulignant que l’accord comportait également des dispositions défavorables aux Algériens. La communiste Soumya Bourouaha a également jugé qu’il ne s’agissait « pas de privilèges et encore moins d’une anomalie » : « Ce sont les conséquences d’une histoire commune qui demeure. » Pour le député de La France insoumise Bastien Lachaud, avec ce texte des LR, « on croirait lire un tract d’extrême droite ».