Dans son nouveau rapport, l’Organisation internationale des migrations (OIM) révèle que l’année 2022 a été hautement meurtrière sur les routes migratoires du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord. Au total, 3 789 décès ont été enregistrés l’an dernier, soit une augmentation de 11% par rapport à 2021. Le précédent record remonte à 2017.
Le nombre de migrants qui ont péri en 2022 sur les routes à l’intérieur et à partir de la région du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord (Mena) n’a jamais été aussi élevé depuis des années, révèle un communiqué de l’Organisation internationale des migrations (OIM), publié mardi 13 juin.
Au total, 3 789 décès ont été répertoriés dans cette zone l’an dernier, soit une augmentation de 11% par rapport à 2021. Le précédent record remonte à 2017, lorsque 4 255 morts avaient été enregistrés, selon les données de l’ONU.
Cette région Mena représente « plus de la moitié du total des 6 877 décès enregistrés dans le monde », note encore le communiqué.
La route libyenne, zone la plus dangereuse en Afrique du Nord
Dans le détail, 203 personnes ont perdu la vie en tentant de traverser le désert du Sahara, tandis que 825 migrants sont morts sur les routes terrestres du Moyen-Orient (la majorité de ces décès sont survenus sur la route entre le Yémen et l’Arabie Saoudite).
La Libye reste la zone la plus dangereuse en Afrique du Nord, avec le plus grand nombre de décès répertoriés : 117 migrants ont péri à l’intérieur du pays sur la route de l’exil.
La traversée du désert du Niger vers la Libye est très empruntée par les migrants désireux de rejoindre l’Europe depuis les côtes libyennes. Le renforcement des contrôles dans cette partie de l’Afrique a poussé les passeurs à emprunter des itinéraires toujours plus éloignés des axes routiers, et donc toujours plus isolés.
Selon un rapport de l’organisation Border Forensic sortie en mai dernier, le nombre de décès dans le Sahara n’a jamais été aussi élevé. « Nous pouvons désormais affirmer que les migrants laissés dans le désert n’ont aucune chance de survivre, avait affirmé à l’époque à InfoMigrants Rhoumour Ahmet Tchilouta, membre de l’organisation. La plupart des exilés, lorsqu’ils sont abandonnés par les trafiquants après une panne de véhicule par exemple, meurent de déshydratation.
Des morts non identifiés
La route maritime de la région Mena vers l’Europe est aussi particulièrement meurtrière. Les départs depuis le Liban vers la Grèce ou l’Italie se sont intensifiés ces derniers mois, provoquant la mort de 174 migrants en 2022. Un chiffre « qui représente la moitié du nombre total de morts sur la route de la Méditerranée orientale l’année dernière », signale l’OIM.
La Méditerranée orientale, centrale et occidentale, reste la route migratoire la plus meurtrière au monde avec 2 406 morts enregistrés en 2022, soit une augmentation de 16% sur un an. L’année 2023 risque d’établir un nouveau record : depuis janvier, ce sont déjà 1 166 personnes qui ont péri ou ont disparu dans ces eaux, dont 1030 en Méditerranée centrale. Un tel nombre n’avait pas été observé depuis 2017.
L’agence de l’ONU rappelle que la majorité de ces morts ne sont pas identifiés : 92% pour la région Mena et 84% pour la route méditerranéenne.
Par ailleurs, le nombre des décès pourrait être plus élevé. Nombre de naufrages se produisent en pleine mer, loin des radars des ONG de sauvetage ou des garde-côtes responsables de la zone. Sur terre aussi, des exilés périssent sans témoin. L’absence de cadavres ou le manque de données pour identifier un corps laisse « des familles désespérées à la recherche de réponses », déplore l’ONU.
L’OIM appelle « instamment [à] une coopération internationale accrue […] pour faire face à cette crise humanitaire et prévenir de nouvelles pertes de vies humaines ».
Les ONG ne peuvent plus secourir plusieurs embarcations à la fois
Les politiques migratoires des États en première ligne dans l’accueil des migrants, principalement l’Italie ou la Grèce, ne tendent pas vers un renforcement des sauvetages. Au contraire. Sur terre, des murs sont de plus en plus érigés aux frontières européennes, comme en Hongrie ou en Grèce pour empêcher les exilés d’atteindre le sol européen. En mer, une nouvelle loi promulguée par Rome en janvier restreint drastiquement les activités des ONG de sauvetage.
Désormais, le gouvernement d’extrême droite de Giorgia Meloni impose aux navires humanitaires d’informer les autorités italiennes dès qu’une embarcation est secourue. Les autorités décident alors du port où rescapés et secouristes doivent accoster. C’est souvent un port lointain du lieu de l’opération de secours. De cette manière les ONG ne peuvent pas secourir d’autres embarcations lors de plusieurs opérations. Par ailleurs, elles perdent beaucoup de temps à se rendre dans les ports assignés et revenir en haute mer.
Pour les humanitaires, cette mesure a pour conséquence une augmentation des décès en Méditerranée centrale.