Le mardi 14 Novembre 2023, en séance publique, le Sénat a adopté solennellement le projet de loi immigration par 210 contre 115 voix. Le texte a été durci par la majorité sénatoriale de la droite et du centre. Le ministre de l’Intérieur s’est, lui, félicité de voir le projet de loi adopté avec une mesure de régularisation par le travail.
Sans surprise, après une semaine d’examen, le Sénat a adopté, le mardi 14 Novembre 2923, le projet de loi immigration par 210 voix contre 115. Le texte avait été profondément remanié par la majorité sénatoriale de la droite et du centre, passant de 27 articles à près de 90. Suppression de l’aide médicale d’Etat, limitation du regroupement familial, durcissement des conditions de régularisation dans les métiers en tension, facilitation des expulsions… « Dans ce texte, nous avons fait passer les marqueurs de la droite. Jamais la droite n’a voté tout ce que nous avons voté au Sénat. Ce n’est clairement plus le texte de Gérald Darmanin, c’est bien le texte de la majorité sénatoriale », s’est félicité ce matin, le président du groupe LR, Bruno Retailleau.
A gauche, les trois groupes, socialiste, écologiste et communiste ont voté contre. Le groupe PS avait dénoncé « les horreurs » votées par la droite sénatoriale. A noté que le groupe RDSE a également voté contre ainsi que les trois sénateurs RN.
« Votre texte reprend consciencieusement les propositions du Front national »
A la tribune, la sénatrice socialiste, Marie-Pierre de la Gontrie a chargé la majorité sénatoriale. « Votre texte reprend consciencieusement les propositions du Front national et de Marine Le Pen […] Votre aile la plus dure a emporté le groupe LR avec le soutien du groupe centriste sur un texte pourtant peu conforme à ses idéaux et avec la complaisance du gouvernement et des sénateurs macronistes […] C’est un naufrage pour la droite, une rupture avec notre modèle républicain, avec l’héritage du gaullisme et l’ambition de cohésion de Jacques Chirac […] Ne vous laissez pas dériver vers une droite extrême qui ne satisfera jamais de vos propositions ».
Dans un communiqué, le groupe écologiste a pointé « un texte dangereux ». « La droite sénatoriale, par calcul politique, a supprimé de nombreux droits et fait voter de graves régressions en voulant occuper le terrain de l’extrême droite. Et le gouvernement, avis de sagesse après avis favorables, ne l’a pas combattue », ont-ils déploré.
En réponse, le président LR de la commission des lois, François Noël Buffet a invité la gauche « à laisser de côté les injures et les caricatures et regarder la réalité […] le contexte, c’est une pression migratoire sans précédent ». « Si je devais traduire ce qu’a voulu la majorité sénatoriale, c’est que d’abord que l’immigration régulière soit choisie […] celle d’une immigration économique qualitative […] Et sur l’immigration irrégulière, eh bien oui, c’est tolérance zéro », a-t-il assumé.
« Pas grand monde n’aurait parié sur le fait que le texte soit adopté »
Le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin s’est félicité de voir le projet de loi adopté avec une mesure de régularisation par le travail. Reprenant, l’expression de François Noël Buffet, il s’est lui aussi adressé aux bancs de la gauche. « Ce n’est pas parce que vous êtes contre le texte qu’il faut le caricaturer ». « Il y a un an, 6 mois, 15 jours, pas grand monde n’aurait parié sur le fait que le texte soit adopté y compris avec une mesure de régularisation. Je m’en félicite ». Le ministre a mis en avant l’adoption d’amendements de tous bords politique comme celui du sénateur communiste, Ian Brossat qui accorde des titres de séjour aux sans-papiers victimes de marchands de sommeil. « Je rappelle que le gouvernement a proposé, sur un amendement de Ian Brossat, des cours de français gratuits (pour l’obtention d’un titre de séjour pluriannuel), pas une seule fois, le groupe socialiste ne l’a proposé quand il était en responsabilité », a-t-il tancé.
Suppression de l’AME : « Une faute morale et une erreur grave en matière de santé publique »
Mais cette « jambe gauche » du texte pourrait ne pas suffire pour obtenir un vote à l’Assemblée nationale où le gouvernement ne dispose que d’une majorité relative, comme l’a rappelé à la tribune, le sénateur Renaissance, Olivier Bitz. « Certaines évolutions du texte nous ont profondément heurtés en particulier la suppression de l’AME. Nous espérons que l’Assemblée nationale reviendra sur ce qui représente à nos yeux une faute morale et une erreur grave en matière de santé publique ». Si le groupe RDPI a voté majoritairement ce texte c’est « en sachant que l’Assemblée nationale reviendra sur certaines dispositions que nous rejetons », a-t-il précisé.
Le plus dur commence donc pour le gouvernement à l’approche de l’examen du projet de loi à l’Assemblée nationale prévu le 11 décembre. « Nous attendons désormais que l’Assemblée nationale reprenne les dispositions du Sénat, seules capables d’une reprise en main de notre politique migratoire. Le Sénat sera très vigilant et refusera de voter un texte final qui ferait semblant », a d’ores et déjà prévenu sur X, Bruno Retailleau.