Nous avons consultés le rapport d’autopsie du journaliste, assassiné à Yaoundé en janvier 2023. Ce document met en lumière les circonstances de son décès.
Le journaliste camerounais et animateur radio Martinez Zogo a été tragiquement assassiné il y a près d’un an, en janvier 2023. Son corps avait été retrouvé le 22 du même mois, vers Soa, une banlieue de la capitale camerounaise. Sa mort, dans laquelle sont soupçonnés d’être impliqués Jean-Pierre Amougou Belinga, patron du groupe l’Anecdote, ainsi que des responsables de la Direction générale de la recherche extérieure (DGRE), en particulier Léopold Maxime Eko Eko, a vite été considérée comme une affaire d’État.
Dans le cadre de l’enquête très controversée sur cet assassinat, des critiques émergent concernant la non-publication du rapport d’autopsie, certaines pièces du dossier d’instruction demeurant inaccessibles pour les parties concernées. Nous avons pu consulter ce document.
Un « sujet de sexe masculin »
Les médecins légistes ont été sollicités dès le 22 janvier 2023, date du décès du journaliste. La procédure a été effectuée en présence de Mpaloa Collins, procureur près le Tribunal de grande instance de Mfou, Ntyam Nkoto Florent, procureur près le Tribunal de première instance de Yaoundé, et Ndoumbé Eteki, substitut du procureur. Ces personnalités étaient accompagnées par des officiers de la Direction régionale de la police judiciaire de la région du Centre et de la compagnie de brigade de Mfou.
Le 22 janvier 2023, vers 9 heures, les autorités ont été alertées à la suite de la découverte d’un cadavre à Ebogo 3, un arrondissement de Soa (Centre), à 5h20, par des résidents. Il a immédiatement été supposé qu’il s’agissait du corps du journaliste Martinez Zogo, enlevé cinq jours plus tôt, le 17 janvier 2023.
Un examen sur les lieux a été effectué, conduisant les enquêteurs et les médecins vers un endroit isolé excavé par les camions pour les travaux routiers, situé à environ 400 mètres de la voie principale. Là, « […] se trouve le corps d’un sujet de sexe masculin de race noire, en état de putréfaction très avancée, sur le sol, complètement nu, en décubitus dorsal [position couchée, NDLR], les membres supérieurs […] étendus le long du corps », constate le rapport d’autopsie de neuf pages. Le corps du défunt a ensuite été acheminé à la morgue de l’Hôpital central de Yaoundé par les services de la gendarmerie, où il a été formellement identifié comme étant celui de Martinez Zogo.
Des analyses en cours à Genève
L’autopsie, réalisée le 10 février 2023, a notamment révélé que les organes génitaux externes et la langue « d’un aspect noirâtre » étaient « tuméfiés », et que le corps présentait des « lésions multiples » ainsi que de nombreuses ecchymoses, notamment au niveau de la paupière droite, de la cavité buccale et des mains. Plusieurs lésions et abrasions ont également été observées dans la région thoracique.
Un bilan toxicologique réalisé sur le site de la découverte du cadavre a permis de prélever une « poudre blanchâtre » et un « liquide de composition non identifiée ». L’analyse de ces échantillons est actuellement en cours dans un laboratoire partenaire basé à Genève, en Suisse.
Les médecins légistes ont conclu que Martinez Zogo avait été « victime de multiples sévices corporels dont l’un à caractère sexuel ». Selon eux, « le lieu de la découverte du cadavre est une scène de crime secondaire » et « le délai post mortem est estimé à 72 heures ». De plus, selon leurs conclusions, « le décès est consécutif aux multiples violences subies. Il s’agit d’une mort violente ». C’est sur cette base que le juge a établi que le journaliste avait été victime de tortures et de viol. Enfin, la famille du défunt a entrepris des démarches afin qu’une autopsie indépendante soit pratiquée par des médecins étrangers.