Les combats meurtriers entre l’armée régulière et les paramilitaires sont entrés samedi 22 Avril 2023 dans la deuxième semaine. Au milieu du chaos, une troisième force, la société civile, poursuit sa mobilisation de manière héroïque pour évacuer les habitants cernés par les combats. Des volontaires mettent en place des opérations de sauvetage sous haute tension, négociant leur passage avec les soldats, exfiltrant des civils au milieu des bombardements. Sur Whatsapp, ou Twitter, les groupes d’entraide se multiplient. Certains affrètent des bus entiers pour l’Égypte ou vers d’autres villes du Soudan moins touchées par la guerre. Toutes ces organisations citoyennes vont prochainement être livrées à elles-mêmes. Alors que presque aucun service public ne fonctionne, la plupart des organisations humanitaires ont annoncé la suspension de leurs opérations. Évacuer Khartoum, c’est aussi le mot d’ordre pour des centaines de ressortissants étrangers que les ambassades essayent de rapatrier au plus vite. Les deux belligérants se disent prêts à faciliter les évacuations d’étrangers, mais ces opérations s’annoncent délicates alors que les deux généraux ont prouvé à maintes reprises ne pas être en mesure de faire cesser les combats. Plus de 150 civils, de diverses nationalités, ont pu quitter le pays.
La première grande évacuation d’envergure a été menée samedi par l’Arabie saoudite. Elle concerne à la fois des Saoudiens et des ressortissants de 12 autres pays, notamment du Koweït, du Qatar, des Émirats, de l’Égypte, du Burkina Faso ou encore de l’Inde et du Pakistan.
Les évacués ont été transportés dans un convoi de véhicules jusqu’à Port-Soudan. Puis ont traversé la mer Rouge à bord des navires saoudiens. Samedi, cinq bateaux sont arrivés à Jeddah, ville portuaire de l’Arabie saoudite. Au total, 91 citoyens saoudiens ainsi que 66 ressortissants de pays frères ont été évacués. « Des diplomates et des fonctionnaires internationaux », a précisé le ministère saoudien des Affaires étrangères.
Des images d’une chaîne de télévision saoudienne montrent aussi des femmes et des enfants arborant le drapeau vert saoudien à bord de l’un de ces navires. Un équipage d’un avion de ligne saoudien qui avait été touché au début du conflit par des coups de feu fait aussi partie des évacué.
La France a entamé une « opération d’évacuation rapide » de ses ressortissants et de son personnel diplomatique du Soudan, où les violents combats sont entrés dans leur deuxième semaine, a annoncé dimanche 23 avril le ministère des Affaires étrangères. Quelque 250 ressortissants français vivent au Soudan, selon une source diplomatique.
Des ressortissants européens et venant de « pays partenaires alliés » sont également pris en charge, indique le ministère, sans plus de précision.
Dimanche dans la nuit, les FSR ont affirmé dans un tweet avoir « coordonné » avec les États-Unis l’évacuation des diplomates américains et de leurs familles à bord de six avions dimanche matin. Une version en arabe du tweet des FSR a indiqué que l’évacuation a déjà eu lieu, une information confirmée par le gouvernement américain quelques heures plus tard. « Aujourd’hui, sur mes ordres, l’armée américaine a mené une opération d’extraction du personnel gouvernemental américain », a affirmé le président Biden dans un communiqué, en appelant par ailleurs à l’arrêt des violences « insensées ».
L’Allemagne, quant à elle, est encore en train d’étudier la faisabilité d’une évacuation. Selon la presse allemande, les ministres de la Défense et des Affaires étrangères du pays ont tenu une réunion de crise samedi 21 Avril 2023.
Pour l’heure, les belligérants se montrent plutôt coopérants. L’armée soudanaise s’est engagée à fournir son aide et les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR) se disent prêts à ouvrir tous les aéroports du Soudan pour évacuer les étrangers. Reste à savoir qui contrôle quel aéroport. Très difficile, à ce stade, d’avoir des informations fiables puisque les deux camps se livrent aussi à une bataille de communication.
Au Royaume-Uni, le gouvernement assure faire « tout [son] possible », alors que des citoyens britanniques, piégés par les combats, se disent abandonnés par les autorités. Le ministre d’État en charge du Développement et de l’Afrique Andrew Mitchell reconnait une « situation extrêmement préoccupante pour les ressortissants britanniques piégés par les combats ». Il assure que les autorités se « préparent actuellement à plusieurs éventualités ».
En deux jours, Rishi Sunak a participé à trois réunions d’urgence. Les ministères de la Défense et des Affaires étrangères élaborent des plans pour évacuer leurs ressortissants par voie aérienne. Des centaines de Britanniques qui résident actuellement au Soudan, dont plusieurs milliers ont la double nationalité, et des dizaines d’employés de l’ambassade à Khartoum attendent des consignes.
Positionnées à la frontière, des troupes britanniques se tiennent prêtes à secourir les déplacés. La situation est préoccupante admet Downing Street, qui a lancé un appel d’urgence à ses citoyens : ils doivent tous s’enregistrer sur le site de l’ambassade. Certains racontent s’être cachés dans des sous-sols, avec des réserves de nourriture et d’eau, en attendant leur évacuation.