Avant de lancer des poursuites contre l’ex-président américain, le juriste progressiste, premier Afro-Américain à la tête du parquet de Manhattan, a travaillé sur la criminalité financière et les violences policières.
1. Inculpation
Alvin Bragg entrera dans l’histoire comme le premier magistrat à avoir inculpé un ancien président américain : le 30 mars, il a mis en examen Donald Trump dans l’affaire Stormy Daniels. Le milliardaire, candidat à la présidentielle de 2024, est poursuivi pour avoir acheté le silence de cette star de films X, avec laquelle il est soupçonné d’avoir eu une liaison en 2006, en lui versant 130 000 dollars prélevés sur ses fonds de campagne à la veille de l’élection de 2016. L’ex-locataire de la Maison-Blanche doit se présenter ce mardi 4 avril devant un tribunal new-yorkais pour se voir signifier formellement les charges pesant contre lui.
2. Doutes
Le procureur de Manhattan avait pourtant douté de la solidité du dossier Stormy Daniels, dont il a hérité à sa prise de fonction. Mais, au début de l’année 2023, il a convoqué un nouveau grand jury, qui a signé la fin de cinq ans d’enquête en votant l’inculpation de Trump.
3. Manhattan
Lorsqu’il est désigné en novembre 2021 à la tête du parquet de Manhattan, il est le quatrième procureur élu à ce poste en quatre-vingts ans, et le premier Afro-Américain. Une prestigieuse fonction élective immortalisée dans les séries télévisées « Law & Order » (« New York, police judiciaire ») et « Blue Bloods ».
4. Démocrate
Alvin Bragg est démocrate et afro-américain, comme les deux autres procureurs qui enquêtent aussi sur Trump : Letitia James, qui poursuit la Trump Organisation, le conglomérat familial, pour fraude fiscale à New York, et Fani Willis, qui pourrait lancer des poursuites contre lui pour avoir cherché à renverser les résultats de la présidentielle de 2020 en Géorgie. Cela n’a pas échappé à Trump, qui vilipende ces magistrats « racistes » et « gauchistes ».
5. Soros
Bragg est-il « soutenu par George Soros », comme l’affirme Trump ? En réalité, le milliardaire philanthrope américano-hongrois, connu pour sa défense des valeurs progressistes, a donné un million de dollars à Color of Change, une organisation militant pour une réforme de la justice pénale, qui a elle-même utilisé ces fonds pour soutenir le procureur lors de sa campagne.
6. Menaces
Devenu la bête noire de Trump qui le qualifie de « psychopathe dégénéré », Bragg a reçu des centaines de menaces dont un courrier contenant de la poudre blanche et l’avertissement « Alvin : I am going to kill you !!!! » Mais le procureur est resté droit dans ses bottes. Il a fait barricader son tribunal et prévenu que « ces tentatives d’intimidation et de menace ne seront pas tolérées ».
7. Harlem
La carrière de Bragg est profondément marquée par Harlem (dans le nord de Manhattan), où il est né en 1973, a grandi et vit toujours. Il y a fait l’expérience de la violence de la rue et de la police. A 21 ans, il a déjà été menacé six fois avec une arme à feu. En 2015, il dirige une cellule chargée d’enquêter sur les violences policières. En 2018, il copilote un projet pour la justice raciale à la New York Law School. En 2021, il représente la famille d’Eric Garner, un Afro-Américain mort en 2014 par étouffement policier, avant de se faire élire pour défendre « l’équité et la sécurité ».
8. Eric Adams
Le maire de New York, lui aussi afro-américain et démocrate, a été élu le même jour que Bragg. Mais ils n’ont pas la même vision de la sécurité. Autant Alvin Bragg prône une diminution des poursuites pour les petits délits et la limitation de la détention provisoire aux cas les plus graves, autant l’ex policier Eric Adams se pose en homme à poigne et fait de la lutte contre la criminalité la pierre angulaire de sa politique.
9. Parcours
Né d’une mère professeure de mathématiques et d’un père travaillant dans une association d’aide aux Afro-Américains, Bragg a toutefois suivi le parcours des élites américaines : la Trinity School, dans le quartier new-yorkais de l’Upper West Side, un master à Harvard, puis un doctorat de droit à la Harvard Law School – par où est également passé Barack Obama.
10. Trump
Ce spécialiste de la criminalité financière a déjà eu affaire à Trump : en janvier, il a fait condamner la Trump Organization à 1,6 million de dollars d’amende pour avoir fraudé le fisc. Et obtenu la condamnation d’Allen Weisselberg, directeur financier de la société, pour évasion fiscale. Il a aussi supervisé l’inculpation de Steve Bannon, l’ancien conseiller du milliardaire, pour blanchiment d’argent et fraude.