L’État le plus puissant au monde va-t-il faire défaut sur sa dette souveraine ? C’est ce qui pourrait survenir d’ici à quinze jours si les républicains et les démocrates échouent à trouver un compromis sur un nouveau plafond de la dette.
Le suspense sur le dépassement – ou non – du plafond de la dette est une singularité de la vie politique américaine. Du moins, c’est le seul pays doté de cette limite qui l’approche souvent et de plus en plus dangereusement.
L’objet de ce plafond mis en place en 1917 était de faciliter la vie du Trésor américain en lui permettant d’emprunter à sa guise, jusqu’au plafond, sans attendre le feu vert du Congrès. Le debt ceiling [plafond de la dette, NDLR] a été crevé et rehaussé des dizaines de fois sans que les citoyens américains s’en aperçoivent. Et sans créer une seule vaguelette à la surface des marchés financiers.
Dépassement
Mais depuis le début des années 2000, la question du dépassement de ce fameux plafond revient de plus en plus souvent et en des termes de plus en plus polémiques. Cela fait plus de quarante ans que la dette américaine enfle à vue d’œil. Depuis le début des années 2000, la crise financière, le Covid-19, maintenant la guerre en Ukraine, ont contribué à alourdir cette dette.
dépassé celle de l’ensemble des autres pays. Le plafond doit donc régulièrement être rehaussé et quand le président au pouvoir n’a pas une majorité confortable au congrès, comme c’est le cas de Joe Biden actuellement, la réponse vire au drame politico-financier.
La dette américaine a crevé le plafond fixé à 31 400 milliards de dollars dès le mois de janvier. Depuis, l’administration ruse pour honorer toutes ses dépenses ; mais au 1er juin, il n’y aura plus de marge de manœuvre, a prévenu la secrétaire au Trésor Janet Yellen. La menace d’un défaut se rapproche donc de jour en jour, faute d’un accord entre républicains et démocrates.
Une menace qui fait frissonner les marchés
Tous les analystes ont sorti les calculettes pour évaluer les pertes potentielles. Ils sont unanimes : quelle que soit la durée du défaut, il aura des effets négatifs, en termes de croissance et d’emplois. Les taux vont se redresser, faisant perdre aux entreprises et aux ménages des marges de financement. Et si ce défaut se prolonge, il ne manquera pas de déclencher une véritable panique sur les marchés financiers.
La moitié de la dette américaine étant détenue par d’autres pays, sa dépréciation va de fait appauvrir tous ceux qui en détiennent, qu’ils soient des Banques centrales ou des investisseurs privés. Dans le contexte actuel de malaise des banques américaines, c’est un scénario catastrophe qui se profile.
Un scénario évitable
Effectivement, on se souvient du psychodrame de 2011. Le plafond a été relevé de justesse après un bras de fer entre Barack Obama et les républicains. Résultat, une dégradation humiliante de la note souveraine des États-Unis par Standard and Poor’s. L’agence lui a retiré son triple A, la marque des États bons payeurs. Aujourd’hui encore, tout dépend du congrès.
Une quarantaine d’élus républicains sont décidés à faire payer très cher le relèvement du plafond. Ils le voteront seulement si Joe Biden accepte des coupes sombres dans les dépenses. Ce qui est inacceptable pour la Maison Blanche.
En prélude au grand marchandage, chaque parti fait monter les enchères, sur fond de pré-campagne électorale pour la présidentielle. Puis vient le temps de la négociation. Le mardi 9 mai, Joe Biden rencontre les ténors du parti républicain pour discuter du budget, et donc des futures dépenses. Ce ne sera sans doute pas la seule conversation nécessaire pour éviter le défaut.